Le syndrome de la cabane et l’adaptation de la famille face au Covid
Le début de l’année 2020, suite à l’état d’urgence sanitaire annoncé, a vu progressivement les populations se mettre en confinement. Durant cette période de quarantaine le temps s’est comme suspendu. Le taux de pollution a baissé considérablement, le taux de chômage et de licenciement a augmenté et les familles se sont retrouvées à vivre ensemble 24h/24, 7j/7.
Quelles ont été les conséquences psychologiques de ce confinement ?
Durant le confinement, privé de lien social, privé de liberté de mouvement, contraint de rester dans un lieu clos avec de possibles sources anxiogènes, la peur et le stress ont été exacerbés. L’enfermement qui a été imposé, à l’heure actuelle où les médias et les réseaux sociaux sont au coeur de notre société, a entrainé une surconsommation d’informations et d’écrans. Cela a pu renforcer l’état anxiogène de la situation par une passivité et un manque de recul face aux nouvelles reçus. L’isolement dû au confinement a eu assurément un effet délétère sur la santé mentale, créant troubles psychologiques et somatiques informe Johanna Rozenblum, psychologue à Paris. En effet, la colère et la frustration, la peur de l’inconnu et de la mort, l’angoisse du lendemain et le sentiment d’impuissance, ont crée un terrain favorable à l’installation de troubles anxieux et dépressifs. Evelyn Josse nous dit « les angoisses générées par l’instabilité des relations conjugales, l’insécurité d’emploi, la crise économique, le réchauffement climatique et la menace terroriste trouvent avec l’épidémie un exutoire ».
Cependant si pour certains le confinement a été vécu comme une situation nocive, pour d’autres ce fut une parenthèse bienvenue, soulagée des contraintes et obligations sociales pour se retrouver avec soi et vivre à son propre rythme. Pour ces personnes, introverties ou marginalisées, qui ne supportaient plus la pression sociale du quotidien, la préoccupation de l’apparence et du regard de l’autre, c’est le déconfinement qui a été problématique.
Quelles ont été les conséquences psychologiques du déconfinement ?
Depuis le déconfinement en Espagne, un nouveau trouble mental a fleuri dans les médias ; le « syndrome de la cabane » ou syndrome du déconfinement.
Ce terme est aujourd’hui sujet à polémique au sein de la communauté de la psychologie. En effet il semblerait qu’il ait été associé à la « fièvre de la cabane » qui désigne « la souffrance psychologique des personnes contraintes au confinement ou isolées dans une zone reculée durant un séjour prolongé ». Les symptômes les plus fréquents sont l’état d’agitation, la dépression, l’irritabilité, les difficultés de concentration, les sentiments d’improductivité et d’inutilité, l’insatisfaction et la frustration. Cette « fièvre » était souvent associée aux personnes vivant en milieu carcéral et si l’on reprend la liste des symptômes on comprend l’erreur qui a été commise. En effet, la symptomatologie évoquée pour la fièvre de la cabane fait plutôt référence à ce que les personnes ont évoqués et ressentit durant le confinement alors que l’utilisation du terme « syndrome de la cabane » a été utilisé plutôt pour signifier la difficulté des gens à sortir de chez eux.
C’est pourquoi la psychologue Evelyn Josse propose l’appellation « syndrome de l’escargot » pour désigner cette réticence à retrouver le monde extérieur, devoir faire face aux autres, au possible rencontres, conflits et confrontations que cela peut engendrer. Cette réticence s’explique aussi par les nombreuses peurs et troubles qui se sont développées à la suite de cette crise sanitaire ; peur de la contamination, peur de l’inconnu, phobie sociale, hypervigilance ou encore troubles obsessionnels. Virginie Bapt, psychologue, nous dit que « cette peur de sortir du confinement révèle au fond la peur de l’autre » et aussi « d’un trouble de l’adaptation, qui peut ressembler dans les cas extrêmes à une dépression nerveuse ».
Nous venons de voir comment les individus ont vécu le confinement/déconfinement mais comment les familles ont traversé la crise ?
En imposant le confinement, la cohabitation au sein d’un même foyer a rendu obligatoire certaines relations familiales alimentant les rapports de forces préexistant.
Les inégalités au sein des foyers se sont creusées, les femmes assumant plus des deux tiers de la charge de travail domestique rapporte C.brousse et les violences familiales ont significativement augmenté. L’ONU tire la sonnette d’alarme à ce sujet dans un article du 7 Avril dirigé par le département de la communication globale, par exemple en France il était recensé une augmentation de 30% des violences conjugales au début du confinement.
D’un autre coté pour contribuer à améliorer la cohabitation des familles ou tout du moins pour prévenir tout déséquilibre, l’Unicef a publié en Mai une liste de conseils adressé à tout foyer pour aider les parents. Le site Papapositive propose aussi de nombreuses activités ludiques et thérapeutiques pour enfants et jeunes adolescents, à faire seul ou en famille, avec matériel ou non pour favoriser le dialogue et l’échange parent-enfant.
Si pour les adultes, à titre individuel, la crise a eu des effets nocifs comme vu plus haut, les enfants et adolescents ne sont pas en reste. En effet, pour les plus petits l’incompréhension règne, du jour au lendemain des restrictions ont été mises en place et les informations données ne sont pas toujours claires. Les enfants et les adolescents sont en grand besoin de sécurité et d’attention, hors la période actuelle a rendu difficile la satisfaction de ces besoins primaires malgré la cohabitation constante avec les parents. Rappelons que les enfants sont des êtres hypersensibles, comparés à des éponges, alors si les personnes responsables de leur bien être sont aux prises avec leur propre détresse psychologique, le développement de troubles psychologiques est à craindre. Evelyn Josse préconise la libre expression des émotions et la mise en place d’activités régulières pour palier à l’ennui et l’apparition de troubles envahissants.
En conclusion, à titre individuel, lors du confinement, des peurs ont été éveillées, exacerbant des craintes latentes et installant un climat de stress et de sentiments toxiques qui avec le déconfinement s’est cristallisé en angoisses voire en troubles anxieux. La peur étant majorée par l’angoisse et les angoisses étant impossible à raisonner, c’est l’histoire du serpent qui se mort la queue. Les familles et la jeunesse ont aussi dû faire face à de nouveaux défis dont les répercussions n’ont pas encore été mises en lumière. Nous terminerons alors par une phrase significative d’Evelyn Josse : « ce qui fonde les peurs sociales, ce n’est donc pas le risque réel mais la représentation que nous en avons ».
Source web :
– http://www.resilience-psy.com/spip.php?article435
– http://www.resilience-psy.com/spip.php?article438#outil_sommaire
– https://www.lepoint.fr/societe/etes-vous-atteint-du-syndrome-de-la-cabane-16-05-2020-2375761_23.php#
– https://www.ra-sante.com/lyon-psycho-stress-depression-peur-effets-deconfinement-14052020.html